samedi 20 juin 2009

Comprends-tu le message ? (Jour 40)

Jour 40
The Message - Grandmaster Flash & the Furious Five
12" (1982) - US

Le hip hop, avant que le nom existe, était déjà dans la rue depuis quelques années. On dansait, faisait des graffititis et rappait sur des beats issues des boîtes à rythme ou sur des breaks empruntés souvent au funk et parfois répétés (mis en boucle, loop) et brisé (scratché) par un DJ. Certains enregistrements avaient eu du succès : Fatback avec "King Tim III" (1979) sur un beat disco funk joué par un band, Sugarhill Gang avec "Rapper's Delight" (1979) sur un loop de l'intro du disco funk "Good Times" du band Chic. The Sequence et "Funk You Up" (1979), Kurtis Blow et "The Breaks" (1980) Funky Four Plus One et "That's the Joint" (1981) utilisent tous la même formule disco funk avec un rap mêlé au mixe comme le veut la tradition soul où le chanteur est sur scène avec les musiciens. Deborah Harry, intéressée par le nouveau phénomène du rap sur de la musique enregistrée et empruntée, fait "Rapture" (1981) avec Blondie. Elle garnit, sur une musique originale mais imitant le style, une partie du morceau d'un rap bancal mais légendaire qui expose le curieux phénomène à un plus large public.

En 1982, Grandmaster Flash & the Furious Five sortent dans les studios de SugarHill de New York un enregistrement qui fera révolution. La pièce sur laquelle ils sont absents, laissant plutôtles auteurs s'exercer, trouvant la pièce trop moche et bizarre, deviendra un classique. Cinq raisons : 1) le beat disco funk est ralenti et décalé, 2) le kick du drum et la basse sont puissants, en avant et appuyés sur les basses fréquences, probablement apporté par la façon de faire jamaïcaine 3) les synthés à portée de main et permettant des recherches rapides de grooves originaux sont omniprésents et 4) le rap est la vedette du mixe, séparé du lot. Et, surtout, la conscience change, 5) le protagoniste rapper ne parle pas de la fête et de la danse, il parle de la rue des ghettos et des conditions sociales qu'on y trouve. Le tout connaît un succès auprès du public, des DJs de discothèque, de la critique rock et surtout des artistes, surtout afro-américains et issus des ghettos, qui créeront à souhait sur ce nouveau canevas qu'on trouvait pourtant curieux et qu'on croyait temporaire à l'époque.

Le riff de synthé du morceau unique en son genre, artefact pris entre deux paradigmes, sera repris à son tour dans les machines des DJs et rappé dessus par tout un chacun pour les décennies à venir. Parce que le morceau, par son originalité, sa répétition hypnotique, ses sons étranges, son groove funky et décalé, son soutien naturel aux textes anecdotiques et aux frustrations, semble avoir mis le doigt sur quelque chose d'authentique et de frais qui donne envie toujours d'y revenir. Voilà la musique hip hop. Personnellement, j'écouterais une version d'une heure du Message et de plusieurs de ses rejetons sans voir le temps passer. Rien de surprenant que les synthés soient dorénavant et pour toujours, avec les boîtes à rythme, les séquenceurs et les procédés d'échantillonnage, dans la boîte à outil des producers hip hop.

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